Vendredi 18 février 1944
Entretien 35 avec Lili
"Je m'adresse à toi. Ecoute ma bien-aimée!
Je continue à parler du sourire.
Vous passez à côté de lui, il est tellement connu!
Vous ignorez ce qu'il signifie.
LE SOURIRE EST LE PONT AU-DESSUS DE L'ANCIEN ABÎME.
Entre l'animal et ce qui est au-delà de l'animal,
un abîme profond.
Le sourire est le pont.
Pas le rictus, ni le rire. Le sourire.
Le rire est le contraire des pleurs.
Le sourire n'a pas de contraire.

Ecoute bien, mon serviteur! Tu es là pour aider.
La clef de tous tes actes, de ton travail, de ton enseignement,
c'est le sourire.
Mets tes protégés à l'épreuve
pour voir s'ils arrivent jusqu'au sourire intérieur,
car ensuite leur mouvement va changer!

SOURIRE - PAROLE - CRÉATION - SONT LES ATTRIBUTS DE L'HUMAIN.
Le sourire, c'est plus sûr que n'importe quelle gymnastique.
Mais attention, car il y a aussi ricanement vide!
Vernis - perfidie - et hypocrisie. Hypocrisie.
LE SOURIRE EST LA PRIÈRE DE CHAQUE PETITE CELLULE,
de chacune et elle monte jusqu'à la bouche.
Le sourire éléve au-dessus de tout.
Le sourire intérieur est la condition première.

Avez-vous observé, où vous en êtes
lorsque vous ne pouvez pas sourire?
Dans la boue, dans la boue gluante.
Jusqu'au cou, ou jusqu'au dessus de la tête.
C'est si simple! Mais personne ne le sait.
Connais-tu quelqu'un qui sourit, réellement, - dis!
Lili - Je ne crois pas.

- Le sourire : condition première! Où sont donc les hommes?
Les pitres! Ils usurpent le visage humain qui est sacré,
et que devient-il?
Un affreux amas de boue! Un tas de chiffons frippés!
Un masque barbouillé!
Les misérables! Les sans-Dieu!
Une seule issue : le sourire. Et il n'est connu de personne.
Quand tu ouvres les yeux le matin, souris-moi!
Quoi que tu commences, avant tes cours, souris!
Que chacun apprenne et essaie le sourire!
Observe le vrai sourire; A quoi le reconnais-tu?
Les yeux n'y participent plus, seulement la bouche."
Demande, mon serviteur!
Lili - Parle-moi de la main!

- La main signifie : être prêt. L'outil est prêt. Disponibilité.
(Ouvrant la main et la refermant ensuite - comme une griffe, crispée)
Je donne... ou je prends.
La griffe est force animale. - La main ouverte est prête.
(J'ai les poings fermés. S'adressant à moi :)
Cela n'est pas encore prêt.
Chez toi, ce n'est pas envie ni avarice,
mais manque de confiance en toi-même.
Tu ne crois pas que c'est LUI qui donne à travers toi.
Tu ne crois pas que tu en es digne.
Sois prête! La main sourit, elle aussi. Tout sourit.
(Vers Lili) Demande!





Lili : A la place de "Que TA volonté soit faite",
pourquoi voulons-nous faire toujours notre volonté?

- Parce que nous ignorons la Sienne.
Si vous pouviez voir SA Volonté autour de vous,
qui apparaît à travers nous,
vous ne désireriez pas faire la vôtre.
SA Volonté est plénitude.
Accomplissons SA Volonté.



Maintenant, c'est la volonté de l'homme qui s'accomplit

et non la Sienne.
L'homme est le plus féroce des carnassiers.
Il n'est pas de griffe animale, pas de patte de lion,
qui puisse accaparer comme la main.
Il sera pris à celui qui prend,
parce qu'il n'est pas digne d'avoir des mains,
car la main n'est pas destinée à prendre.

As-tu encore une question?
Lili - Comment pourrions-nous renforcer l'unité entre nous quatre?

- En accomplissant votre tâche.
Notre tâche est le Monde Nouveau.
Que feriez-vous dans le Monde Nouveau pour le Monde Nouveau?
Sachez à quoi vous êtes destinés!

RECONNAÎTRE LA TÂCHE,
C'EST VOIR APPARAÎTRE DANS SA PURETÉ L'INDIVIDUALITÉ.

C'est la seule méthode, tout autre chose n'est que palliatif à la douleur,
dont le nom est : "trop" ou "peu".
Je reste .
Il n'y a que le mot qui s'éloigne,
car il est enfant du temps.



Dialogue avec l'ange - Transcrit par Gitta Mallasz
Editions Aubier-Montaigne, Paris - 1976
  


Ce livre est le compte rendu d'une série d'événements qui ont eu lieu en Hongrie entre 1943 et 1944. Ce n'est ni fiction, ni journalisme, ni littérature. Le lecteur doit le prendre tel quel. Ou le laisser.